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Florence N
29 septembre 2008

Des associations dénoncent l’emprise de l’argent sur l’adoption

28/09/2008 20:40
Des associations dénoncent l’emprise de l’argent sur l’adoption

L’adoption internationale se plie de plus en plus aux lois du « marché
». Mais cela peut mener à de nombreuses dérives

Lors d’une émission diffusée sur Parenthèse radio, le 27 août dernier,
un père adoptant au Vietnam évoquait les « dons imposés » aux
orphelinats qui oscillaient, disait-il, entre 6 000 et 10 000 €. Yves
Nicolin, président de l’Agence française de l’adoption (AFA), invité à
l’émission, précisait alors que ces dons étaient laissés « à la
discrétion des parents », avant d’ajouter : « Par contre, ceux qui ne
donnent pas ou qui donnent insuffisamment, il faut savoir qu’ils
mettent, entre guillemets, en péril l’adoption de futurs adoptants. Et
quand je disais que dans certains pays, les Français passent pour des
pingres, c’est une réalité. »

Ces propos ont suscité la colère des responsables de la principale
fédération des familles adoptives, EFA (Enfance et familles
d’adoption), qui vient d’envoyer à Yves Nicolin une lettre de réaction
assez vive (1).

Après avoir souligné qu’au regard des revenus mensuels de nombreux 
pays d’origine, 10 000 € était une somme « astronomique », cette 
lettre précise : « Il est normal que la France et les autres pays 
d’accueilcherchent à aider les pays d’origine à se doter de services 
de protection de l’enfance (…). Mais il est tout à fait anormal que le
président de l’Agence française de l’adoption encourage par ses propos
une attitude qui pourrait se résumer à la devise “donner plus pour
adopter plus” : une telle attitude, qui par ailleurs dit clairement aux
familles les plus modestes qu’elles sont “interdites” d’adoption,
réduit l’adoption à une transaction et les enfants à une monnaie
d’échange. »

"De moins en moins d’enfants adoptables et de plus en plus de demandes"
« Je n’ai jamais fait la promotion d’une telle attitude, j’ai voulu
simplement expliquer une réalité, se défend Yves Nicolin. Une naissance
biologique coûte cher, environ 15 000 €, payés par la collectivité.
L’adoption elle aussi a un coût important. Les pays d’origine qui
proposent des enfants réclament aux pays qui veulent adopter une 
forme de coopération humanitaire. Comme il y a de moins en moins 
d'enfants adoptables et de plus en plus de demandes, les autorités 
des pays qui  utilisent l’adoption pour financer des orphelinats vont
demander plus d’argent qu’avant : c’est une réalité et il ne faut pas 
se voiler face. »

Il est vrai qu’adopter un enfant à l’étranger coûte de plus en plus
cher. Dans l’argent réclamé aux familles par l’AFA ou les Organismes
autorisés pour l’adoption (OAA), il y a un certain nombre de frais
fixes, qui peuvent se justifier : voyage, logement, traducteurs,
démarches administratives, avocats parfois… Mais les familles se
trouvent parfois soumises à des frais supplémentaires qui peuvent être
sujets à caution. Notamment ceux destinés à payer les « intermédiaires
».

En Russie par exemple, il existe des « facilitateurs » qui font payer
des honoraires parfois exorbitants pour mettre en relation une famille
avec un orphelinat. Très souvent aussi, il faut verser une somme
supplémentaire destinée à financer des projets humanitaires ou de
protection de l’enfance dans le pays d’origine. Celle-ci peut être
directement versée à l’autorité centrale du pays ou à l’organisme
officiel qui a servi d’intermédiaire, une pratique qu’EFA considère
comme « normale ».

Une somme « laissée à la discrétion des parents »...
Mais on demande souvent aussi aux parents de donner directement une «

enveloppe » à l’orphelinat au moment où ils viennent chercher leur
enfant. Il peut s’agir d’une somme fixe établie à l’avance, comme en
Chine (environ 5 000 €) ou d’une somme « laissée à la discrétion des
parents », comme au Vietnam. « À l’AFA, on leur donne simplement une
fourchette de prix qui nous semble raisonnable, souligne Yves Nicolin,
pour éviter les abus. Par ailleurs, nous travaillons au Vietnam avec
des orphelinats qui nous offrent les garanties que l’argent sera
correctement utilisé. »

C’est précisément cette pratique de l’« enveloppe » que la fédération
des familles adoptives condamne. « D’abord parce que dans les pays où
la corruption existe, il n’existe aucune garantie que les sommes
versées serviront à la protection de l’enfance, souligne Janice Peyré,
présidente d’EFA. Par ailleurs, en versant des sommes aussi colossales
à des pays où les revenus sont si bas, on est en train de créer un
appel d’air et d’inciter les familles à l’abandon. Surtout, on ne peut
pas construire une relation avec un enfant sur la base d’une
transaction. »

Chez les adoptés adultes, cette question est très souvent évoquée. «
Certains ont le sentiment d’avoir été achetés. CrC3er des liens
familiaux dans ce contexte est difficile », souligne David Hamon,
président de « Racines coréennes ». Pour Dominique Gawron,
vice-présidente d’EFA et enfant adoptée, les choses doivent être
claires : « Tous les enfants adoptés demandent un jour ou l’autre
combien ils ont “coûté”. Il faut que leurs parents puissent leur
répondre droit dans les yeux, sans hésiter, qu’ils n’ont pas été
“monnayés”. »

Christine LEGRAND

(1) « Quand le président de l’AFA invite les familles à ne pas se
montrer pingres. »

http://www.la-croix.com/article/index.jsp?docId=2351308&rubId=4076

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